SUR LE POUCE

Cette pratique ancestrale et culturelle dans bon nombre de pays a peu à peu envahi les grandes villes. Les raisons de cette tendance sont diverses : mobilité, budget, course contre la montre, appropriation de l’espace public, argumentent en faveur de la street food. Exit le sandwich de boulangerie, le casse-croûte avalé sur un bout de banc ! Aujourd’hui le bien-manger, le savoureux, le désir d’évasion ont conquis la cuisine de rue et les chefs se sont emparés de ce phénomène de consommation nomade. Tour d’horizon de la street food bordelaise : sur le pouce, de la gastronomie plein les doigts ! Par José Ruiz

LA FABRIQUE BY OLIVER

Dans les années 2010, le hamburger était devenu synonyme de nourriture rapide de mauvaise qualité avec le développement des grandes enseignes multinationales. C’est à cette période que le chef Bruno Oliver décida de créer son camion (« truck »), le By Oliver. Avec l’ambition de tirer vers le haut ce hamburger médiocre tout en conservant un prix raisonnable (moins de 10€). Un véritable précurseur dans la vague des food- trucks apparus depuis. La suite s’écrivit rue Fondaudège avec l’ouverture, juste avant le covid, de la Fabrique By Oliver, « food- truck sans les roues », comme il présente le comptoir ouvert sur la rue qu’il installe au numéro 70. On commande par la petite fenêtre, et on repart avec son sandwich, le « pain ferré », LA création friande du cuisinier. « Il fallait se distinguer avec un produit, dit Bruno Oliver. J’ai dû apprendre à faire le pain, un pain qui nécessite 4 farines pour rester croustillant, en lui conservant sa souplesse et l’acidité du pain de campagne à croûte épaisse ». Travaillé en forme de galette, le pain cuit sur la plancha pour capter cette note de fer (d’où son nom), puis il sera roulé et garni. Asperges du Temple et porc basque, blanquette de veau ou bœuf bourguignon selon les saisons, il se mange avec les doigts. La carte de la Fabrique BO tourne autour de salades, de desserts et de ces galettes nommées « rocks », avec des produits frais, préparés sur place, chaque matin. « Pour moi, la street food, c’est une façon culturelle de s’adapter au monde qui change», proclame-t-il.

70 rue Fondaudège, Bordeaux

La Fabrique

JO SMOKE HOUSE

La cuisson, très longue, au feu de bois, permet une cuisson douce, le fumage à chaud apportant une saveur plus légère, moins prononcée que sur un saumon ou un magret. C’est la technique du barbecue nord américain. Une méthode adoptée par Joachim Labrot avec son Jo Smoke House. Il sert ainsi viandes fumées en BBQ, et burgers (dont un vegan). Épaule de porc et collier de bœuf bios et locaux ainsi cuisinés sont servis en buns ou en sandwich, avec une sauce maison (tomate, miel, soja réduit, oignons…)

Jo Smoke House

MADONNA ME

Dans ses Pouilles natales, ça se passe comme ça. Le client entre, commande sa focaccia, et repart avec. C’est sur ce modèle que Fabiana Pesane a créé Madonna Me en 2020. Avec cette idée qu’une focacceria qui se fait une bonne réputation trouvera vite sa clientèle. Si fait. La progression est vertigineuse, avec la focaccia travaillée comme là-bas, et la recette de la mamma de Fabiana comme socle. La pâte de cette Paresa, croustillante et mœlleuse, n’a pas d’égal. Et charcuteries et fromages sont du pays !

134, cours Balguerie, Bordeaux

Madonna Me

ORIGINE BK

Viande grillée à la broche apparue à Berlin dans les 70’s, le kebab a depuis colonisé les trottoirs des villes. En France, le salade-tomate- oignon s’est imposé partout. Ou presque. Car Origine BK (pour Berliner Kebab) reprend à Bordeaux les fondamentaux avec une version crudités-feta-grenade. Et surtout des viandes marinées 24h sur place, et montées en broche chaque matin. Travail des sauces, mayonnaise maison, harissa au combawa, la maison revendique de redonner le goût du kebab à qui n’en a plus goûté depuis 15 ans !

19 rue du Mirail, Bordeaux

Origine BK

LE BOUQUET SAINT-PIERRE

Micro pousses, fleurs comestibles et présentation au cordeau, tout comme dans un gastro : les galettes du Bouquet ont de l’allure. Voilà ce qui fait de cette enseigne un lieu unique. Les viandes ? Cuites au barbecue, lentement. On mijote, on fume aussi, sur place. Chaque mois, on refait la carte. Les légumes bios arrivent du potager des Chartrons. Les Capus fournissent pastrami et pulled pork. Et la farine bio de Blasimon, permet de faire maturer la pâte 3 jours. Elle deviendra galette, sucrée ou salée, selon les goûts.

6 rue des Bahutiers, Bordeaux

Le Bouquet Saint-Pierre

FORTICHE

Remettre le sandwich au goût du jour, lui redonner le statut de plat à consommer assis, voilà la mission que se sont fixée 3 associés, en ouvrant Fortiche en juillet dernier. Le pain vient de la Fabrique Pains et Bricoles. Charcuteries, fromages, légumes (rôtis selon les saisons), tout y est local. On compose son sandwich avec deux ingrédients principaux, et on opte pour une sauce maison, mayonnaise estragon, moutarde au miel… Côté desserts ? Crumble cannelle, rocher coco, mœlleux chocolat, tout est fait sur place.

8 rue des Bahutiers, Bordeaux

Fortiche

HESTIA

Des produits frais, des tarifs raisonnables (menu à 13,90€) et une cuisine grecque à emporter que les deux associés maîtrisent. Tout est maison, du pain aux sauces, à base de yaourt, de concombre, d’houmous, d’harissa, de caviar d’aubergines, de poulet mariné… Les recettes sont grecques, et leur interprétation française, et améliorées à base de pickles de légumes, de graines de grenade, de moutarde… Les pommes dauphines remplacent les frites, et la salade grecque retrouve des accents ensoleillés avec le printemps.

4 rue Castillon, Bordeaux

Hestia

MAE TU

Au Laos comme dans toute l’Asie du Sud Est, chaque famille a sa propre recette du rouleau de printemps. Philippe Renou, lui, applique celle de sa grand mère. Le cuisinier laotien et Ludivine, son épouse, s’étaient installés discrètement derrière Saint Christoly en 2019, en créant Maé Tù (la mamie) pour n’y servir que ce seul rouleau de printemps. Roulée dans une galette de riz et tapioca, une base menthe coriandre confiture d’oignons chou chinois accompagne porc curry ou poulet mariné dans une formule unique et savoureuse.

12 rue Poquelin-Molière, Bordeaux

Mae Tu

YELADIM

Le poulet chawarma est la vedette, dès que Mikaël Draï lève le volet de Yeladim, son food truck. Symbole de l’ouverture et du goût pour le partage que défend le cuisinier, il souligne combien le plat est commun au Maroc, à la Syrie, au Liban, à Israël… Plats palestiniens, plats israéliens, origines communes, la carte de Yeladim est un message de paix voulu par le chef. Le végétal domine (pois chiches, sumac, tahini) sous l’influence du médiatique chef Ottolenghi qui apporte la touche gastro.

Food truck itinérant

Yeladim